Autres auteurs :
Franck Bancel (Academic Advisor)
Bruno Belgodere (Director of Economics Affairs of Premiere Ligue)
D’un point de vue financier, investir dans un club de Ligue 1 n’est pas si irrationnel. Plus le budget est important, moins le risque est élevé.
Le secteur du football est régu lièrement présenté comme un exemple « d’exubérance – irrationnelle » du point de vue de ses pratiques financières (rémunération des joueurs, montant des transferts, etc.). Les clubs de football sont souvent décrits comme peu performants dans leur gestion financière et comme des entités opaques et risquées.
Pourtant, malgré cette image peu flatteuse, l’attractivité du secteur ne se dément pas. De grands clubs européens ont ainsi été acquis par des investisseurs de diverses nationalités, qui ont investi des sommes importantes : Manchester City, Chelsea, le PSG et plus récemment l’Olympique de Marseille, racheté par l’investisseur américain Franck McCourt.
1. LES RESULTATS SPORTIFS, SEUL VRAI RISQUE
Le club de football serait-il la « danseuse » du financier du XXI siècle ? Une des manières de faire avancer ce débat serait de mesurer les risques pris par les financiers quand ils investissent dans le football. Quels sont ces risques ? Peut-on les quantifier ? Est-il envisageable de s’en prémunir ? Existe-il des gisements de valeur dans les clubs qui sont aujourd’hui sous-estimés ?
La réponse à la première question est la plus simple : pour un club de football, le risque est avant tout sportif. Un club qui « sous-performe » sur un plan sportif devra assumer, l’année suivante, une baisse de ses revenus et de ses ambitions. Sur le long terme, l’absence de résultats sportifs dégrade progressivement la valeur de la marque. Ce risque sportif n’est pas le même pour tous les clubs, c’est une évidence.
2. LA PERFORMANCE, INTIMEMENT LIEE AU BUDGET
En revanche, ce qui est plus surprenant, c’est l’ampleur des écarts entre les clubs. Nous avons ainsi pu mesurer la corrélation entre le risque sportif (et donc les revenus) des clubs de Ligue 1 et leur budget. Ainsi, aucun club dont le budget est supérieur à 100 millions d’euros n’a été, durant les dix dernières années, relégué en Ligue 2.
The football sector is regularly portrayed as an example of ‘irrational exuberance’ with regard to its financial practices (player remuneration, prices of transfers, etc.). Football clubs are often described as underperforming in their financial management and as opaque and risky entities.
However, despite this unflattering image, the appeal of the sector is undeniable. Investors of diverse nationalities have invested significant sums to acquire large European clubs: Manchester City, Chelsea, Paris Saint-Germain, and more recently Olympique de Marseille, bought by the American investor Franck McCourt.
Les clubs présentant les budgets les plus importants ont seulement 8 % de risque d’être classés entre la 10e et la 17e place
Les clubs présentant les budgets les plus importants ont seulement 8 % de risque d’être classés entre la 10 et la 17 place, 65 % de chance de se qualifier pour la Ligue des champions et 23 % de se qualifier pour la Ligue Europa. A l’autre extrême, un club dont le budget est inférieur à 40 millions d’euros a 22 % de risque d’être relégué en Ligue 2, 4 % de chance de se qualifier en Ligue Europa et seulement 1 % en Ligue des champions.
Dit autrement, le budget conditionne les résultats sportifs et on observe que cette tendance s’est significativement renforcée au cours des dernières années avec l’arrivée d’investisseurs et l’accroissement des droits télévisuels. Le budget total de la Ligue 1 est ainsi passé en dix ans de 850 millions d’euros à environ 1,5 milliard d’euros, permettant à quatre clubs d’avoir un budget supérieur à 100 millions d’euros en 2015.
3. ECART SUPPORTABLE
Par ailleurs, les clubs de Ligue 1 disposent de réserves de valeur importantes. En 2015, la majorité des clubs de Ligue 1 (15 clubs) ont un écart entre la valeur de marché et la valeur comptable de leur et la valeur comptable de leur effectif compris entre 2 et 15. Cette réserve de valeur s’explique en partie par le fait que de nombreuses équipes détiennent un centre de formation performant et sont capables d’éduquer des joueurs de premier plan dont la valeur n’apparaît pas dans les comptes.
Investir dans le football n’est donc pas complètement irrationnel d’un point de vue financier. Le risque est quantifiable et, par ailleurs, très fortement corrélé au budget. En Europe, la Ligue 1 dispose d’un important potentiel de développement et a vocation à continuer à attirer des investisseurs. Au total, avec un risque de mieux en mieux appréhendé et maîtrisé par les financiers, le football est un territoire qui leur reste encore à défricher, toujours à la recherche de nouvelles opportunités d’investissement.